10- Quelques projets singuliers
Quelques projets donnent une image idéale
de ce qu’aurait pu être l’aménagement de cet espace,
s’il avait été fait selon le plan de 1924.
L’espace idéal est celui de la Cité universitaire réalisé en 1920 (reconnue d’utilité publique le 6 juin 1925) grâce à André Honnorat (ministre de l’Instruction Publique) et le soutien d’Émile Deutsch de la Meurthe (mécène et industriel alsacien), grâce à une contribution privée.
L’architecte Lucien Bechmann, connaît bien l’expérience des campus américains, s’en inspire et imagine pour la Cité universitaire un hameau jardin pour étudiants. La Cité universitaire est un des projets les plus révélateurs de cette image d’un paysage idyllique pensé pour cette emprise.
Le dispositif construit par la ville sur les anciens bastions, est constitué d’une sorte de double dispositif de ségrégation sociale à l’échelle de l’ensemble de Paris.
Il n’y aura pas d’Habitations à Bon Marché à l’ouest de la ceinture, comme il n’y aura pas de logements de luxe dans le XXe. Une ségrégation plus fine intervient sur chaque segment de l’enceinte : les terrains bien desservis, situés au droit des stations de métro ou des portes sont vendus pour faire des ensembles de logements pour la classe moyenne. Les terrains les plus distants sont utilisés pour faire des écoles, des piscines ou autres équipements municipaux. Entre les deux, il y aura une gradation de logements sociaux. Les HBM dites améliorées seront plus proches des portes, celles pour une population plus pauvre seront plus éloignées.
Premières HBM de la ceinture à partir de 1926 reliquat des constructions d’avant-guerre, modèle abandonné dans la poursuite du lotissement de la ceinture, Porte Montmartre (XVIIIe).
Les HBM les plus communes, les plus fréquentes, celles qui donnent à la ceinture une apparente impression d’homogénéité de par leur trompeuse ressemblance, rue Lafenestre (XIVe), 1933.
Dabit pleure ce paysage des fortifs vues par Lucien Pissaro ou Zola, ces fortifs “poumons de la ville”. Le public y voit toujours la même muraille que celle des fortifs, une muraille qui aurait enflé et qui serait sortie de terre en se trouant de fenêtres et de couloirs.
L’écrivain Georges Sadoul, en 1935, y voit « des villes surpeuplées, des poumons sans air, des blocs d’immeubles d’une agressive laideur, des cours étroites comme des puits et d’affreuses ambiances de petites rues qui se tortillent comme des vers coupés en deux. »
On constate que les quartiers bourgeois héritent d’HBM plutôt soignées, présentant une certaine qualité architecturale avec l’emploi de matériaux nobles comme la pierre en parement. Ainsi, les portes de Paris donnant sur les bois parisiens bénéficient d’un traitement spécifique, alors qu'à la porte Dorée les HBM alternent entre pierres de parement et briques. Dans le XVIe arrondissement, la logique de l’habitat bourgeois s’applique de façon démesurée aux constructions de la SAGI sur la séquence allant de la porte d’Auteuil au square Tolstoï.