5-La guerre, la Commune
« Faisons la révolution d’abord, on verra ensuite. »
Louise Michel
Barricade rue Lafayette et Faubourg Saint-Martin, 18 mars 1871
De 1804 à 1870, la France a vécu principalement sous des régimes politiques plus ou moins autoritaires
Premier Empire, Restauration, Monarchie de Juillet, Second Empire. Le régime républicain et la démocratie représentative n’ont été que des expériences passagères. La Commune de Paris trouve sa source dans un élan républicain se référant à la Première République.
Mais le Gouvernement révolutionnaire de la Commune de 1792, l’insurrection populaire de juin 1848, sous la Deuxième République, qui a été réprimée de façon sanglante par le gouvernement issu de la Révolution de février 1848 y tient aussi une grande place.
Le mur étant là, les détracteurs ne manquent pas. Ils vont pointer l’absurdité d’un tel système défensif.
« Paris assiégé, c’est le gouvernement renversé et la France saisie au cœur. Qu’est-ce donc que cela pour l’Europe sinon une capitulation avant la bataille ? »
Lamartine, depuis les bancs de la Chambre, le 21 janvier 1841
Origines de la Commune
En juillet 1870, Napoléon III entreprend contre la Prusse une guerre mal préparée, qui le conduit rapidement à la défaite.
Le 4 septembre 1870, à la suite d’une journée d’émeutes parisiennes, l’Empire est renversé. Un gouvernement de défense nationale s’installe à l’hôtel de ville de Paris officiellement pour poursuivre la guerre contre les États allemands, dont les troupes occupent le nord du pays. Selon certaines interprétations, ce gouvernement issu de la classe dominante aurait surtout œuvré à signer la capitulation et à faire accepter la défaite aux Français dans le but d’enrayer la menace du socialisme parisien, qui sans l’aide des Allemands aurait été incontrôlable.
L’épreuve du feu, la capitulation
Août et septembre 1870, les services municipaux et préfectoraux s’emploient à la réfection et au réarmement des fortifications de Paris qui ne sont plus équipées militairement et font office d’octroi. Dans la précipitation, la défense nationale s’organise et les retranchements, bastions et pont-levis sont renforcés.
Septembre 1870, l’enceinte connaît l’épreuve du feu, les prussiens assiègent Paris, mais plutôt que de se risquer à un assaut, ils se contenteront de bombarder la ville dès janvier 1871 depuis les hauteurs que les canons français n’atteignent pas. Paris ne se rend pas, c’est le pays qui capitule, le gouvernement provisoire signe un armistice avec le nouvel Empire allemand qui entre dans la ville en mars 1871.
« Croit-on pouvoir faire la Révolution sans les femmes ? Voilà 80 ans qu’on l’essaie et qu’on n’en vient pas à bout. »
André Léo, romancière féministe, 8 mai 1871
Mais se prépare déjà un autre siège : celui de la Commune. D’autres Communes se forment à Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne et Le Creusot, elles seront écrasées début avril, laissant Paris seule.
Les femmes n’ont pas le droit de vote, mais sont actives dans les assemblées, défendent la Commune, combattent avec les hommes, apportent leurs soins aux blessés. Grâce à elles, le droit au travail des femmes, l’égalité des salaires avec les hommes, la promotion de l’instruction des filles et l’union libre sont amorcés.
Le 28 mars
La Commune qui rêve d’un gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple est proclamée et s’installe à l’Hôtel de Ville. Cette “République démocratique et sociale” suspend le paiement des loyers pour soulager la souffrance populaire et décrète, entre autres, dès avril sur la réquisition des ateliers abandonnés, l’interdiction du travail de nuit dans les boulangeries, l’interdiction des amendes et retenues sur salaires dans les ateliers, la récupération gratuite des objets de moins de 20 francs déposés au Mont-de-piété et l’égalité des enfants légitimes et naturels, des épouses et des concubines pour la perception des pensions.
Le 6 mai
Thiers qui veut écraser la Commune, refuse les tentatives de conciliation.
Du 21 au 28 mai, 120 000 versaillais conquièrent la capitale contre quelques milliers de “fédérés” appuyés sur plusieurs centaines de barricades improvisées. Les armées Versaillaises, celles du gouvernement légal, chargées de la répression de l’insurrection n’entreront pas dans Paris au prix de combats homériques livrés au pied des murs, elles s’introduiront presque subrepticement par la poterne du Point du Jour, dont un citoyen, Jules Ducatel, leur aura indiqué le relatif dénument. La Commune aura tenu soixante-dix jours. Commence alors la Semaine sanglante, puis la fin de la Commune.
Le 23 mai
Prise de Montmartre et exécutions massives de communards rue des Rosiers, au parc Monceau et à l’école militaire,
le 24 : prise du quartier du Panthéon, des communards font exécuter six otages, massacre de communards au Quartier Latin.
Les 25 et 26 : combats dans le quartier de la Butte-aux-Cailles, prise du quartier de la Bastille, cinquante otages détenus à la prison de la Roquette sont exécutés rue Haxo, massacre de communards au Panthéon.
Le 27 : combats sanglants au Père-Lachaise.
Le 28 : dernières barricades à Belleville.
L’hécatombe
En 1876, le journaliste et polémiste socialiste Prosper-Olivier Lissagaray, ancien communard, estime de 17 000 à 20 000 le nombre des fusillés.
En 1880, le journaliste et homme politique Camille Pelletan, membre du Parti radical-socialiste élève le nombre des victimes à 30 000. Toutes ces estimations ont été depuis largement revues à la baisse par l’historien britannique Robert Tombs, qui estime que les communards ont eu entre 6 000 et 7 500 morts, dont environ 1 400 fusillés.
Le décompte
Les Versaillais déplorent 877 tués, 6 454 blessés et 183 disparus dans les combats livrés du 3 avril au 28 mai.
40 000 parisiens sont arrêtés et enfermés à Versailles.
Les tribunaux prononcent 10 137 condamnations dont 93 à mort, 251 aux travaux forcés, 4 586 à la déportation (en particulier en Nouvelle-Calédonie dans des conditions terribles), les autres à des peines de prison variables.
Vingt-trois condamnés à mort seront effectivement exécutés.
La suite
Janvier 1875, la République est instaurée, mais il faudra attendre mars 1879 pour qu’une loi d’amnistie partielle soit votée.
La première commémoration de la Commune aura lieu au mur des Fédérés le 23 mai 1880. La loi d’amnistie pleine et entière sera enfin votée en juillet 1880, les condamnés et exilés pourront rentrer en France.
Le 29 novembre 2016, l’Assemblée nationale vote la réhabilitation de toutes les victimes de la répression versaillaise.